Les invités de la conférence "Avenir et perspectives pour une unité démocratique en Europe"
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Dans le cadre des Boréales et pour l’ouverture de la 30e édition du festival, en partenariat avec Normandie pour la Paix, une conférence sur la thématique « Avenir et perspectives pour une unité démocratique en Europe » s’est tenue à l’Abbaye aux Dames mercredi 9 novembre.
L’événement qui a fait salle comble a été ouvert par Sophie Gaugain, 1re vice-présidente de la Région Normandie et Patrick Nicolle, président de Normandie Livre lecture.

La conférence réunissant Håkan Åkesson, ambassadeur de Suède en France, Matti Anttonen, ambassadeur de Finlande en France, Eduards Stiprais, ambassadeur de Lettonie en France, Nerijus Aleksiejunas, ambassadeur de Lituanie en France, et Lembit Uibo, ambassadeur d’Estonie en France, était animée par Céline Bayou, chargée de cours à l’INALCO, chercheure associée au Centre de recherche Europe-Asie (CREE) à l’INALCO et rédactrice en chef de la revue en ligne Regards sur l’Est.

Forum Mondial

Céline Bayou démarre la conférence en rappelant l’actualité de l’agression de l’Ukraine par la Russie, qui soulève des questions sur le devenir de la sécurité et de l’unité européennes, notamment autour de la région nordico-balte.

D’un point de vue sécuritaire, cette région a toujours été stratégique. Pour mémoire, l’équilibre nordique pendant la guerre froide reposait sur le principe de non intervention. Mais cette stabilité fut rompue avec la fin du pacte de Varsovie et la chute de l’URSS. Pourtant, l’adhésion de la Pologne, des pays baltes et de l’Union européenne à l’OTAN n’a pas suscité de réaction de la Russie à l’époque. Or aujourd’hui, la future adhésion de la Suède et la Finlande semble inquiéter le Kremlin. Sur la question de l’OTAN, Håkan Åkesson, ambassadeur de Suède en France et Matti Anttonen, ambassadeur de Finlande en France ont une vision relativement similaire. Les deux pays ont la volonté forte, en adhérant à l’Alliance atlantique, de contribuer à la sécurité des membres de l’Alliance autant que de bénéficier de sa protection. Ce changement de posture pour les deux pays adoptant jusqu’ici une politique de non alignement militaire est directement lié à l’invasion de l’Ukraine par Vladimir Poutine. Les ambassadeurs voient dans cette adhésion un levier de sécurité pour maintenir une stabilité dans le nord de l’Europe. 

« La Suède a augmenté son budget de la défense pour la première fois depuis la Deuxième Guerre mondiale, à hauteur de 2% du PIB, ce qui pourra également contribuer à renforcer la protection de pays membres de l’OTAN » Håkan Åkesson

Du côté des pays baltes, les ambassadeurs, notamment Eduards Stiprais, ambassadeur de Lettonie en France, indiquent que ce contexte a renforcé leur sentiment de sécurité et d’appartenance européennes. Selon Lembit Uibo, ambassadeur d’Estonie en France « Poutine est devenu le meilleur VRP de l’OTAN » puisque cette invasion la rend plus légitime et que de nouveaux pays veulent la rejoindre. Nerijus Aleksiejunas, ambassadeur de Lituanie en France, ajoute qu’en juillet 2023 la Lituanie accueillera le prochain sommet de l’Alliance Atlantique.

À la question de Céline Bayou sur l’articulation entre la défense européenne et l’Alliance transatlantique, Nerijus Aleksiejunas estime qu’une guerre est sans doute le meilleur moyen de vérifier que ces organisations fonctionnent et favorisent l’unité. Lembit Uibo considère qu’il existe une véritable complémentarité entre la défense européenne et le rôle de l’OTAN. Håkan Åkesson de son côté précise même que « le renforcement de la coopération européenne renforce également le lien transatlantique ».

Sur le sujet de l’après-guerre, les ambassadeurs sont unanimes quant à l’enjeu crucial d’une victoire de l’Ukraine et une défaite stratégique de la Russie, au risque de voir l’histoire se répéter, avec la Russie ou d’autres Etats autoritaires comme la Chine avec Taïwan. Pour Eduards Stiprais, « ce n’est pas un conflit entre deux États mais un conflit des valeurs ».

On note ainsi le fort attachement des pays baltiques à leur indépendance, une indépendance qui a été remise en cause plusieurs fois à travers l’Histoire. Nerijus Aleksiejunas précise que la Lituanie, qui fut le premier pays à sortir de l’URSS, a été également le premier pays à mettre un terme aux importations énergétiques en provenance de Russie. Cela peut inspirer le reste de l’Europe, tant sur le plan de la dépendance énergétique vis-à-vis de la Russie que sur le plan économique avec la Chine. Lembit Uibo, ambassadeur d’Estonie en France, cite son premier ministre « le gaz coûte cher mais la liberté n’a pas de prix ». Dans le même esprit, Matti Anttonen argue que la Finlande est « immunisée contre les risques d’autoritarisme et d’extrémisme de la Russie et de la Chine ». Enfin, il avance qu’en diminuant leur consommation d’énergies fossiles, les pays nordiques luttent à la fois pour la sauvegarde de la démocratie et pour la protection de l’environnement, enjeu qui leur est particulièrement cher également. 

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