Ruby Bridges
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En 1960, Ruby Bridges est la première fillette afro-américaine à intégrer une école réservée aux Blancs aux Etats-Unis. Aujourd’hui porte-parole de sa fondation, elle plaide auprès des enfants, et au forum mondial Normandie pour la Paix, en faveur de la tolérance et du respect des différences.

Forum Mondial

Le 14 novembre 1960, Ruby Bridges, six ans, est escortée par des agents fédéraux pour franchir les portes de l’école élémentaire William-Frantz à la Nouvelle-Orléans. Elle est la première enfant noire à intégrer une école jusque-là réservée aux Blancs. Six ans auparavant, la Cour suprême a jugé anticonstitutionnelle la ségrégation raciale dans les écoles publiques. Les habitants blancs de la Nouvelle-Orléans ont violemment protesté, jusqu’à ce qu’un juge de la ville leur donne tort.  Les parents de Ruby, « fils de fermiers du Mississippi qui n’ont pas eu la chance de faire des études », ont répondu à l’appel du NAACP (Association nationale pour la promotion des gens de couleur). Mais dans le Sud ségrégationniste, les Blancs ne sont pas du tout prêts à accepter cette intégration. 


Ruby est accueillie au seuil de l’école par les huées d’une foule raciste. « Ma mère m’avait prévenue qu’il pourrait y avoir beaucoup de gens mais je ne comprenais pas que j’étais la cause de leur colère. » La voilà « catapultée à six ans dans le mouvement des droits civiques ». Les officiers de police locaux et de l’Etat ayant refusé de la protéger, ce sont les marshall fédéraux qui l’accompagnent. La scène est immortalisée par le peintre Norman Rockwell dans son tableau The problem we have live with qui fera la Une du magazine Live en janvier 1964. On y voit Ruby et ses gardes du corps longeant un mur sur lequel a été tracé le mot « nigger » (nègre). Rarement sorti des Etats-Unis, le tableau sera visible au Mémorial de Caen à partir du 10 juin. 


"Il n’y a pas de racisme inné"


Ce jour-là, tous les parents blancs ont retiré leurs enfants de l’école. Ruby pénètre dans un bâtiment vide. Les enseignants aussi ont quitté l’établissement. Tous, à l’exception d’une professeure, blanche, qui pendant un an va faire cours à Ruby seule, comme si elle enseignait à toute une classe. Originaire de Boston, au Massachusetts, elle s’appelle Barbara Henry. « Elle est devenue pour moi une mère et j’ai appris auprès d’elle à ne juger personne à la couleur de sa peau. C’est grâce à elle que je ne vois pas le monde à travers le prisme de la race. » La famille de Ruby le paiera cash. Son père perd son emploi et ses grands-parents sont renvoyés de leurs terres. 


« Ce qui m’a protégée, c’est l’innocence de mon enfance, s’émeut-elle. Il n’y a pas de racisme inné, ce sont les adultes qui le deviennent. » C’est pourquoi, devenue adulte, elle a choisi de travailler avec les enfants, de leur raconter inlassablement son histoire, « pour que plus aucun enfant ne subisse la haine et le racisme. » En 1999, elle a créé la Ruby Bridges Foundation, qui œuvre auprès des jeunes pour promouvoir « les valeurs de la tolérance, du respect et de l'appréciation des différences ». Aujourd’hui, l’école élémentaire William-Frantz n’accueille plus que des enfants noirs, et dans certains Etats d’Amérique « des enfants manifestent pour avoir le droit d’aller à l’école sans crainte qu’on leur tire dessus ». Les combats à mener sont nombreux encore. Ruby Bridges, dernière héroïne de la lutte pour des droits des Afro-Américains, transmet le témoin. Ce mardi 4 juin, après son intervention au forum mondial Normandie pour la Paix, elle rencontre des écoliers caennais. « Ce sont nos enfants qui vont changer le monde », conclut-elle.

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